« Friends against wind » reprend une
interview par Eugénie Bastié parue dans le Figaro du 8 février dernier :
« La religion
éolienne prospère cupidement sur le désir de sauver la planète. »
Alexandre Gady, président de Sites & Monuments, une association aussi connue sous le nom de Société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France (SPPEF).![]() |
Alexandre Gady est président de Sites & Monuments, une association aussi connue sous le nom de Société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France (SPPEF). |
LE FIGARO. — La question des éoliennes semble
ressurgir dans le grand débat, dont une section concerne la transition
énergétique. Est-ce une bonne chose que les citoyens s’emparent du sujet ?
Alexandre
GADY. — L’éolien étant aujourd’hui financé par une taxe assise sur
l’essence, c’était inévitable. Mais les citoyens se sont en réalité emparés
depuis plusieurs années de la question des aérogénérateurs industriels, dits «
éoliennes ». Comme personne ne les écoute, ils n’ont eu d’autre choix que de
combattre ces machines qui fabriquent beaucoup d’argent, mais peu
d’électricité. Parmi les moyens utilisés, face à la surdité des élus et des
administrations, ils ont multiplié les recours en justice, et les associations
avec eux. Comme dans bien d’autres domaines de notre vie publique, il est grand
temps que les responsables politiques cessent de tenir à distance les Français
de ce qui constitue leur environnement, ce bien commun qui est aussi la
richesse des pauvres. C’est d’ailleurs l’esprit de la charte d’Aarhus (convention
sur la démocratie environnementale signée en 1998 par 39 États, NDLR), dont les
principes sont entrés dans notre constitution.
Le gouvernement a annoncé sa
volonté de doubler la capacité éolienne de la France d’ici à 2030. Cette
annonce vous paraît-elle raisonnable ?
Elle est
désespérante, puisque tout le monde sait maintenant que ces aérogénérateurs ne
fonctionnent pas : l’intermittence de ce type de production appelle forcément
un complément, donc le relais d’une énergie fossile. On accélère dans une
mauvaise direction avec une fausse solution ! C’est sans doute bon pour les
lobbys éoliens et l’affichage « vert » du gouvernement (l’effet « totem »),
mais pas pour les citoyens qui ont la malchance d’habiter à côté des
aérogénérateurs, ni pour les paysages, qui font la beauté de ce pays et
attirent des millions de visiteurs. Le business éolien doit cesser !
Parlez-nous des décrets Lecornu
et Rugy. En quoi changent-ils la donne en matière d’éolien terrestre ?
Le premier, du 29
novembre 2018, s’inscrit en fait dans une tendance à l’œuvre depuis dix ans :
face aux nombreux recours, les politiques n’ont pas cessé de changer les règles
du jeu pour simplifier les procédures et rendre toujours plus difficile
l’action des opposants. Au lieu de s’interroger sur la raison de ces recours,
qui sont coûteux et difficiles pour les citoyens, ils ont travaillé à
satisfaire les lobbys éoliens qui réclamaient des « facilités » de plus en plus
exorbitantes. Le décret Lecornu supprime ainsi notamment un degré de juridiction,
renvoyant tout le monde devant les cours administratives d’appel, juridiction
onéreuse, sans bénéficier de l’analyse (parfois définitive) du tribunal
administratif. Au fond, on s’étonne presque de cette pudeur : pourquoi ne pas
supprimer le principe même du recours lui-même, ce qui nous permettrait de nous
aligner avec le droit nord-coréen ou vénézuélien ? Tout cela serait comique si
ce n’était pas grave, car le droit a pour fonction de solder pacifiquement les
conflits. Le second décret, signé le 24 décembre 2018, expérimente en
Bretagne et dans les Hauts-de-France le remplacement de l’enquête publique
éolienne, basée sur l’indépendance des commissaires-enquêteurs, par une
participation du public sur Internet, dont la synthèse sera confiée aux préfectures.
Pourtant, les avis des commissaires-enquêteurs réservaient de belles surprises
! Dernièrement, l’un d’entre eux a émis un avis négatif sur l’encerclement
éolien du château breton de la Bourbansais. Que diront désormais les
services de la préfecture d’Ille-et-Vilaine soumis à l’objectif du doublement
de notre capacité éolienne ? Sites & Monuments vient naturellement
d’intenter un recours en annulation de ces décrets devant le Conseil d’État.
Les décrets de novembre et
décembre 2018 ont été précédés par deux consultations publiques. Respectivement
95 % et 93 % des contributions leur ont été défavorables. Le gouvernement
n’écoute pas les Français ?
En France, démocratie
parfois immature, une consultation est en fait une information délivrée au bon peuple,
qu’on écoute d’une oreille distraite pour se donner bonne conscience : mais
quand le résultat ne va pas dans le sens souhaité, alors il est nul et non
avenu. Les associations vivent ça quotidiennement. Sur ce plan, le gouvernement
actuel n’est hélas pas différent de ceux du vieux monde…
Que demandez-vous au
gouvernement ?
D’écouter moins les
lobbys et plus les citoyens, d’être moins idéologue et plus pragmatique.
L’objectif est de sauver le climat ? Prenons des mesures appropriées ! Avec de
très nombreuses autres associations, Sites & Monuments réclame depuis des
années un moratoire sur les « éoliennes » : arrêt des chantiers et des projets
en cours ; évaluation de ce qui a été réalisé en termes de performance, de
coûts réels pour les finances publiques et l’attractivité de notre pays. Quand
les véritables chiffres seront sur la table et librement débattus, la religion
éolienne apparaîtra pour ce qu’elle est : une supercherie qui aura prospéré
cupidement sur le désir de sauver la planète. J’observe avec inquiétude depuis
trois mois qu’il a fallu toute cette violence, ces blessés parmi la police et
les manifestants, ainsi que des dizaines de millions de dégâts pour que le
président de la République commence à comprendre ce qui est à la base de notre contrat
social : en démocratie, on ne dirige pas le peuple, on gouverne pour lui.
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